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Maître Bachir analyse la récusation de la Cour constitutionnelle par l’opposition politique nigérien

  • Photo du rédacteur: Maaroupi Sani
    Maaroupi Sani
  • 25 août 2015
  • 3 min de lecture

Dans une communication orale présentée aux doctorales de l’université de Toulon le 17 octobre 2014, nous nous étions attachés à mettre en lumière les relations croisées qui se sont établies au fil du temps entre deux acteurs majeurs de la vie démocratique nigérienne : le juge constitutionnel et le pouvoir politique. Nous rappelions dans cette communication que, de l’histoire du constitutionnalisme en Afrique francophone, la justice constitutionnelle au Niger a été la plus marquée par les vicissitudes de l’événement politique avec des multiples mutations à la clé. Comme beaucoup d’autres Etats en Afrique, le Niger est en transition démocratique depuis 1990. Cette longue transition encore inachevée, est l’épilogue de multiples crises démocratiques, jalonnées par plusieurs interruptions de l’ordre constitutionnel. Depuis la proclamation de la République du Niger le 18 décembre 1958, pas moins de huit Constitutions ont contribués à réguler la vie politique du pays, notamment au progrès du droit, des libertés et de la démocratie . La promulgation, le 25 novembre 2010, de la nouvelle Constitution actuellement en vigueur et les élections générales de 2011, marquent le début de la VIIème République. Le constitutionnalisme a connu « des fortunes diverses » au Niger. Il traverse depuis deux décennies une phase d’intenses activités et est devenu un élément déterminant de la vie politique. Quelques remarques et observations ne sont certainement pas inutiles dans l’appréhension de la délicate question relative aux rapports entre juge et politique, dans un contexte globalement perturbé par des crises politiques sans précédent.


Revenons-en aux faits. De quoi s’agit-il ? Dans une déclaration publique rendue le 18 janvier 2015, une coalition de partis politiques de l’opposition regroupée au sein d’une alliance : l’alliance pour la réconciliation la démocratie et la république (A.R.D.R), a solennellement annoncé la récusation « stricto sensu » de la Cour constitutionnelle régulièrement installée le 25 mars 2013.

En effet, l’opposition accuse la Cour constitutionnelle de partialité et de faire allégeance au pouvoir en place. A l’appui de sa déclaration, cinq griefs ont été relevés par l’ARDR pour illustrer sa suspicion légitime quant à la partialité de la Cour. Ainsi, elle relève :

– une tendance de la Cour à sa propre saisine en statuant « ultra petita » incluant dans les Arrêts des réponses à des questions qui ne lui sont pas posées dans les requêtes de l’opposition ; – des ambigüités, des incohérences et des contradictions traduites dans ses Avis et Arrêts; – Sa prétention à outrepasser ses compétences, attributions et ses missions en s’arrogeant des pouvoirs que ne lui confère aucunement la Constitution, notamment le rôle de régulateur du fonctionnement des institutions et des pouvoirs publics ; – L’accointance et les affinités de la cour constitutionnelle, en particulier sa présidente, avec le régime ; – L’immixtion de la Présidente de la Cour Mme ABDOULAYE DIORI NÉE KADIDIATOU LY dans les affaires politiques.

Cette déclaration, de l’opposition politique, a suscité un débat d’une rare importance aussi bien dans les milieux politiques que dans le monde universitaire ; sur les réseaux sociaux, les débats sont parfois d’une violence inouïe entre les Nigériens. Ce qui n’a pas manqué d’inquiéter certains observateurs et/ou critiques, quant à « l’évolution des rapports entre le juge constitutionnel et le pouvoir politique au Niger ». Se pose ainsi le problème de la séparation des pouvoirs et l’épineuse question de l’impartialité du juge.

C’est en effet l’article 60 de la loi organique 2012-35 du 19 juin 2012, déterminant l’organisation, le fonctionnement de la Cour constitutionnelle et la procédure suivie devant elle, qui pose le principe du respect de l’impartialité de la Cour en ces termes : « Les membres de la Cour constitutionnelle doivent s’abstenir de tout ce qui pourrait compromettre leur indépendance, leur impartialité et la dignité de leurs fonctions.» Ce principe d’impartialité, on le retrouve dans plusieurs textes internationaux auxquels le Niger est partie et qui constituent le bloc de constitutionnalité visé dans le préambule de la Constitution. Sans être exhaustif, on peut citer l’article 14 § 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de New York, l’article 10 §1 de la Déclaration Universelle des droits de l’homme et l’article 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des Peuples.




 
 
 

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